Le Conservatisme comme rejet de la logique de l’Histoire.

Le Conservatisme comme rejet de la logique de l’Histoire

Afin de permettre aux lecteurs d’appréhender la notion de « conservatisme » telle qu’elle est utilisée par de nombreux acteurs de la vie politique russe contemporaine, nous  proposons ici quelques extraits de l’ouvrage fondamental d’Alexandre Douguine « La Quatrième Théorie Politique », paru dans sa version française chez Ars Magna Éditions, Septembre 2012.

Les extraits du texte ci-dessous proviennent des pages 86 et 87. La note de bas de page ne figure pas en tant que telle dans le texte d’Alexandre Douguine ; il s’agit d’un extrait des pages, 83 et 84, inséré ici afin de permettre la compréhension de la pensée de l’auteur.

 ————————————–

Il existe néanmoins une possibilité ontologique de dire « non ». Ici commence le conservatisme.

Premièrement qu’est-ce que le conservatisme ? C’est un « non » adressé à ce quiest autour. Et au nom de quoi ? Au nom de ce qui était avant. A proprement parler au nom de ce qui a été dépassé au cours de l’histoire sociopolitique. Le conservatisme est le fait d’occuper une position scientifique, culturelle, religieuse, morale, individuelle, sociopolitique, philosophique, ontologique qui nie le cours de l’histoire auquel nous faisons face maintenant et que nous avons identifié et décrit auparavant.[1]

Abordons à présent le conservatisme et les topiques sociophilosophiques en se démarquant desquels il est possible de nier la logique même de l’histoire qui conduit au moderne et au postmoderne. Nous considérons l’Époque moderne et son vecteur linéaire de progrès, ainsi que sa courbe postmoderniste, qui nous conduit dans les labyrinthes de la dispersion de la réalité individuelle en sujets et post-sujets rhizomatiques. Mais on peut également inclure dans ce schéma les stades précoces qui ont rendu cette tendance possible et dominante. Le conservatisme construit sa position sur l’opposition à la logique du développement du processus historique. La phénoménologie moderne et, à notre époque, postmoderne, dont le conservatisme se démarque de l’acceptation, sert d’argument dans cette opposition. Cependant le conservatisme en tant que structure ne se résume pas à la contestation des phénomènes. La phénoménologie considérée comme négative ne constitue rien de plus qu’un prétexte. Le conservatisme construit sa topique en niant la logique, le travail et la direction du temps historique.

Le conservatisme peut construire son opposition au temps historique de diverses façons et dispose de trois possibilités fondamentales de considérer les tendances conceptuelles, moderne et postmoderne. Ici commence la systématisation et la structuration du conservatisme. Il s’agit d’une systématisation dénuée de préférence, c’est pourquoi il s’agit d’un raisonnement scientifique et non pas d’un jugement de valeur.

[1] … au sein de l’espace de la pensée, dans la philosophie, dans la géographie de l’esprit humain, le pôle de ce monde unipolaire est représenté par quelque chose d’autre que les États-Unis ou l’Europe en tant que pure formation géopolitique, et précisément par l’idée de la liberté maximale. En effet, le mouvement vers l’obtention de cette liberté constitue le sens de l’histoire humaine comme le comprend la société européenne occidentale. La société européenne occidentale a su imposer au reste de l’humanité cette façon de comprendre le sens de l’histoire. (pp 83-84)