Tous les discours et les commentaires trahissent une gigantesque abréaction à l'événement même et à la fascination qu'il exerce. La condamnation morale, l'union sacrée contre le terrorisme sont à la mesure de la jubilation prodigieuse de voir détruire cette superpuissance mondiale, mieux, de la voir en quelque sorte se détruire elle-même, se suicider en beauté. Car c'est elle qui, de par son insupportable puissance, a fomenté toute cette violence infuse de par le monde, et donc cette imagination terroriste (sans le savoir) qui nous habite tous.
L’Atlantisme est l’idéologie dominante des sociétés européennes actuelles, celle qui aura sans doute le plus d’influence sur le devenir de nos destinées communes et pourtant elle est de ces idéologies presque cachées dont on ne parle ouvertement que dans le cercle restreint du monde alternatif. Sont Atlantistes tous les collaborateurs européens de la vision hégémonique des États-Unis et de son idéologie propre qui répond au doux nom d’impérialisme. Autrement dit, l’Atlantisme est l’idéologie des exécutants serviles de l’idéologie impériale américaine ; elle lui est subordonnée et ne tire de sa soumission que les miettes de l’empire tombées à terre après le festin des empereurs.
C’est une idéologie mineure dans l’idéologie majeure. Elle est à la fois honteuse et conquérante : honteuse parce qu’elle ne joue jamais que les seconds rôles ; conquérante, parce qu’elle emprunte à son maître d’outre-atlantique ses visions hégémoniques délirantes et toutes ses caractéristiques totalitaires. C’est un totalitarisme dans le totalitarisme, une domination de dominés, un impérialisme de serfs et d’esclaves passés maîtres dans l’art de se soumettre. Parler de l’Atlantisme européen c’est parler du projet impérial américain et réciproquement. La seule chose qui les distingue est leur place dans la hiérarchie totalitaire : le premier n’est que l’émanation du second, ne se définit que par lui, se contente de l’imiter et lui obéit en tout ; il n’est, en revanche, son égal en rien.
Le concept de nation est un concept capitaliste, occidental. Pour sa part, l'Eurasianisme, au contraire du nationalisme, met en valeur les différences culturelles et ethniques, et non pas une unification basée sur l'individu. Nous nous différencions du nationalisme parce que nous défendons un pluralisme des valeurs. Nous défendons des idées, pas notre communauté ou notre société. Nous contestons la postmodernité, mais pas seulement pour le compte de la nation russe. La postmodernité est un gouffre béant. La Russie entre seulement pour partie dans cette lutte globale. Elle en est certainement un élément important, mais pas le but ultime. Nous considérons ne pas pouvoir sauver la Russie sans sauver le monde en même temps. Et de même, nous ne pouvons pas sauver le monde sans sauver la Russie.
Ce n'est pas seulement une lutte contre l'universalisme occidental. C'est une lutte contre tous les universalismes, même les islamiques. Nous rejetons toute volonté d'imposer un universalisme, qu'il soit occidental, islamique, socialiste, libéral ou russe. Nous ne défendons pas l'impérialisme ou le revanchisme russe, mais plutôt une vision globale et une multipolarité basées sur la dialectique civilisationnelle. Ceux auxquels nous nous opposons disent que la multiplicité des civilisations conduit nécessairement à l'affrontement. C'est une affirmation fausse. La mondialisation et l'hégémonie américaine provoquent des ingérences sanglantes et déclenchent des flambées de violence chez des civilisations entre lesquelles pourrait exister, en fonction des circonstances historiques, la paix, le dialogue ou l'antagonisme. Mais imposer une domination sous-jacente implique le conflit et conduit inévitablement au pire dans l'avenir. Ainsi, ils parlent de paix mais ils font la guerre. Nous, nous défendons la justice – pas la paix ni la guerre, mais la justice et le dialogue et le droit naturel de tout ensemble culturel de préserver son identité et de contrôler son destin. Nous devons nous libérer de ces prétendus universalismes.
Le monde actuel est unipolaire avec l’Occident globalisé en son centre et les États-Unis en son cœur.
Cette unipolarité a des aspects géopolitiques et idéologiques. Géopolitiquement, c’est ladomination stratégique de la Terre par l’hyper-puissance nord-américaine et l’effort de Washington pour organiser l’équilibre des forces sur la planète dans un sens qui lui donne la capacité d’imposer des règles au monde entier selon ses propres intérêts nationaux (impériaux). Cela est mauvais parce que cela prive les autres États et nations de leur vraie souveraineté.
Quand seule une instance décide de qui est bon et qui est mauvais et qui devrait être puni, nous avons à faire à une sorte de dictature globale. Je suis convaincu que ce n’est pas acceptable. Nous devrions lutter contre cela. Si quelqu’un nous prive de notre liberté, nous devons réagir. Et nous le ferons. L’Empire américain devrait être détruit. Et sur un point, il le sera.
Idéologiquement, l’unipolarité est basée sur les valeurs Modernes et Postmodernes, qui sont ouvertement anti-traditionnelles. Je partage la vision de René Guénon et Julius Evola qui ont considéré la Modernité et ses bases idéologiques (l’individualisme, la démocratie libérale, le capitalisme, le consumérisme, etc.) comme les causes de la catastrophe à venir de l’humanité, et d’autre part la domination globale du style occidental comme la raison de la dégradation finale de la Terre. L’Occident approche de sa fin et nous ne devrions pas le laisser entraîner tout le reste dans l’abime.